Lukas Rüegg, vous êtes consultant dans une agence spécialisée dans le développement de marques. Comment expliquez-vous votre travail à un profane ?
La stratégie de marque ou branding est un domaine du marketing qui consiste à développer et à gérer des marques, notamment en définissant leurs matérialisations. Cela commence par la recherche de réponses à des questions de portée stratégique ayant par exemple trait au positionnement qu’une marque veut occuper ou aux valeurs qu’elle veut représenter dans l’esprit des groupes d’intérêts. Lorsque ces fondements sont posés, nous les matérialisons en leur donnant une apparence formelle et en l’associant à des contenus. Les messages visuels et textuels doivent rendre l’identité de la marque tangible non seulement intellectuellement, mais aussi émotionnellement.
Le branding pour une fabrique de ciment se distingue-t-il de celui pour une banque ?
Le processus reste le même. Nous devons toujours commencer par cerner le contexte de la marque : nous devons connaître son histoire, le cadre dans lequel elle évolue, son marché et son environnement culturel. Nous établissons donc un bilan de départ et définissions les objectifs. Dans une deuxième phase, nous nous demandons comment elle doit évoluer. Évidemment, nous avons plus de liberté lorsqu’il s’agit d’une toute nouvelle marque que lorsque nous devons intervenir pour relancer une marque existante. En effet, en cas de re-branding, outre la définition d’objectifs, nous devons aussi nous pencher intensément sur la situation de départ.
Votre profession est-elle devenue plus difficile au cours de ces dernières années ?
Elle est certainement devenue plus complexe. Cela est d’une part dû à la numérisation, partant à la multiplication des points de contact qui en découle pour chaque marque. D’autre part, nos clients en savent aujourd’hui bien plus en la matière qu’il y a une vingtaine d’années encore, lorsque j’ai commencé à me consacrer à la stratégie de marque. Pour la plupart, les professionnels de la communication savent aujourd’hui très bien de quoi il en retourne et pourquoi le façonnement et l’entretien de la marque sont importants.
Comment la numérisation influe-t-elle sur la stratégie de marque ?
La numérisation a entraîné une dynamisation. Auparavant, les fondements d’une marque demeuraient valables des années durant. Nous étions dans une situation pour ainsi dire statique. Aujourd’hui, une marque est quelque chose de dynamique par essence. Nous ne créons plus un corset rigide fait de règles détaillées, mais un « ADN » qui évolue et s’adapte en continu. La numérisation conduit aussi à davantage de dialogue, dialogue qui doit être conduit activement. Par ailleurs, les possibilités étendues dans le domaine du traitement de données ouvrent de nouvelles perspectives que des logiciels de collaboration dont l’efficacité ne cesse de s’accroître rendent de plus en plus immédiates.
Le comportement des utilisateurs a-t-il lui aussi changé ?
Oui, nous nous sommes tous habitués à certains standards. Il suffit de penser à la convivialité d’une boutique en ligne moderne. De telles habitudes façonnent également les attentes envers une marque. La SSO n’y échappe pas. Aujourd’hui, même une association ne peut plus se permettre d’ignorer les tendances sociales et technologiques.
Vous et votre équipe, vous développez la nouvelle identité de marque de la SSO. Comment procédez-vous ?
Nous nous intéressons tout particulièrement aux interactions entre les divers groupes d’intérêts : membres, non-membres, public, interlocuteurs institutionnels, etc. Par expérience, nous savons que le fonctionnement des associations et bien plus complexe que celui des entreprises. Il y a plus d’organes et d’instances, les processus décisionnels sont plus longs et de nombreuses fonctions sont exercées à titre accessoire. Dans le cas de la SSO, nous nous sommes en outre demandés si et le cas échéant dans quelle mesure et à quel rythme il convient de modifier la perception que l’association a d’elle-même. Enfin, question très importante, comment faire pour ne perdre personne en route durant ce voyage passionnant ?
Pourquoi la stratégie de marque est-elle également importante pour une association ?
Le façonnement actif d’une marque consiste en fin de compte à inscrire une image claire dans les esprits des groupes d’intérêts. Cette image doit être diffusée de manière aussi claire et cohérente que possible. À cet égard, les associations ne se distinguent pas des entreprises. Le but de chaque association est clairement défini et chaque association a quelque chose à vendre, soit des prestations qui s’obtiennent par le truchement de l’affiliation. Cela n’est possible que si elle dispose d’un haut niveau de crédibilité et que ses prestations ont une valeur évidente. Elle doit en permanence convaincre ses membres et ceux-ci doivent savoir pourquoi ils sont affiliés. C’est pour ces raisons qu’il est important pour toute association de constamment entretenir sa marque, surtout en interne.
La SSO est une association professionnelle dont une grande partie des cadres exercent leur fonction à titre accessoire. Cela rend-il la gestion de la marque plus difficile ?
Les cadres de l’association disposent certes de moins de savoir spécifique en la matière que celui que l’on trouve au sein du service de communication ou de la direction d’une entreprise. Mais cela ne doit pas forcément être problématique. Si je prends le cas de la SSO, ce manque est plus que compensé par l’important engagement personnel et le grand intérêt de tous les participants. Nous ressentons que notre expertise est prise au sérieux et appréciée. La situation serait bien plus difficile si le manque de savoir spécifique se conjuguait à un rejet des conseils. Pour ma part, je trouve que le travail avec la SSO est très constructif et axé sur la recherche de solutions.
Les structures des associations professionnelles sont fédéralistes. Cela représente-t-il un défi particulier sous l’angle de la gestion de marque ?
J’y vois plutôt une chance. Il n’est certes pas possible d’imposer certaines choses depuis le sommet, il faut convaincre. Mais le jeu en vaut la chandelle, car les sections et les membres sont d’excellents ambassadeurs de la marque tant il est vrai qu’ils sont tous les jours en contact avec les patients. Il est rare qu’une marque puisse s’appuyer sur autant de représentants qualifiés. Nous allons leur fournir les outils qui leur permettront de rendre la marque SSO tangible, jour après jour.
La nouvelle identité de marque de la SSO sera rendue publique en octobre. Qu’est-ce qui attend les différents groupes d’intérêts internes (sections, sociétés de discipline, commissions, membres) et externes (autorités, patients, public) ?
Un nouveau départ. La nouvelle identité de marque est moderne et dynamique et elle reflète adéquatement le cœur de la marque SSO : « Avancer ensemble ». Avec ses nombreuses nouvelles offres et fonctions, le nouveau site web de la SSO sera une plaque tournante cruciale. Il facilitera le quotidien de chaque membre et la communication entre toutes les parties concernées, en particulier dans la zone réservée aux membres.
Comment la SSO pourrat-elle s’assurer de la durabilité de l’effet de la nouvelle stratégie de maque ?
En revenant toujours au cœur de la marque : « Avancer ensemble ». Cette maxime doit constamment être réinterprétée. Si on veut garder une marque en vie, il ne faut jamais arrêter de la développer.